Opérateur scan 3D mobile

Les tendances high-tech du Salon Global Industries 2019

Le salon Global Industrie de Lyon 2019 fût un véritable témoin de la transformation digitale de l'industrie !

Hugo Sibué
Emeric Mourot
12 mars 2019
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Veille

On pouvait s’attendre à un show de grosses machines mais le salon Global Industrie de Lyon qui s’est tenu du 5 au 8 mars 2019 est aussi un bon témoin de la transformation digitale de notre monde. Le secteur industriel n’est pas en reste car au delà des innovations, il a aussi ses startups et ses nouveaux modèles. Sans être exhaustif, voici quelques tendances que j’ai pu constater.

Une grande partie du salon était dédiée aux solutions numériques, connectées et collaboratives pour l’industrie. Nous sommes bien dans la 4ème révolution industrielle, dans toutes les allées nous parlons de transformation digitale, ce n’est pas un scoop. Les machines-outils sont toutes à commande numérique, de l’usinage à la découpe (beaucoup de machines laser ou à eau sous pression), en passant par le traitement de surface ou l’assemblage de pièces. Les robots sont partout et multi-forme. D’ailleurs, chose étonnante, j’ai croisé peu de formes humanoïdes, à croire que l’humain n’est pas adapté à l’environnement industriel. La question qui me vient rapidement à l’esprit est : dans combien de temps l’homme va disparaître des univers de production ? Il y a des bras articulés pour du déplacement d’objets ou comme support d’outils (peinture, soudure, usinage, etc.), des robots autonomes « roulants » se déplaçant entre différents espaces et maintenant il y a même des drones chargés de réaliser des inventaires automatiques par les airs (Eyesee / Squadrone). Antoine Level, CEO de Squadrone, me partageait que pour la première fois un inventaire avait pu être réalisé plus rapidement que prévu avec un taux de couverture proche de 100%, ça ouvre une nouvelle ère.

Le côté impressionnant de ce salon est, pour les néophytes du monde industriel, la taille des équipements. Certaines machines occupent plusieurs dizaines de mètres carrés, et elles sont exposées là, au salon, en fonctionnement bien sûr. Je comprends un peu mieux les centaines de semi-remorques garés sur le parking exposants. Au passage, c’est un des rares salons auxquels j’ai pu assister où l’on entend des bruits de machines qui travaillent.

La fabrication additive occupe une place toujours plus grande et concurrence directement les procédés de fabrication par usinage, plus économe sur la matière car rien n’est perdu. Les imprimantes 3D utilisent des matériaux toujours plus variés, certaines pièces imprimées sont flexibles, d’autres totalement déformables (sorte de caoutchouc), mais globalement, ce que je note c’est que la qualité et la productivité augmentent (plus de résistance, meilleur finition, imprimantes plus rapides). Certaines pièces imprimées ont même une résistance supérieure à une pièce usinée dans la matière pour un poids bien plus réduit. L’intérieur de la pièce est une structure cloisonnée (type nid d’abeille parfois) d’où le gain de poids et de résistance.

Toutes les grandes tendances du monde high-tech sont représentées, on note bien que la convergence des mondes réels et digitaux est en marche.

Augmenter l’humain

Pour atténuer la pénibilité de certaines tâches, Gobio propose des exosquelettes ultra-light et AIO invente le capteur pour l’analyse des postures et des mouvements au poste de travail permettant de calculer un indice relatif de pénibilité du poste de travail.

Pertech Solutions commercialise un système se présentant comme une paire de lunettes sans les verre qui analyse les yeux de l’opérateur et leurs mouvements. Pour ceux qui sont du domaine des sites ou applications web, c’est un peu le hotjar du monde réel. Un pointeur indique en permanence dans la vue caméra intégrée à cette paire de lunettes là où l’opérateur pose le regard. C’est le capteur idéal pour valider l’ergonomie de tableaux de bord ou de commande, analyser les réactions dans des situations critiques ou même suivre la vigilance de l’opérateur. Autre application utile, permettre à des handicapés moteur d’écrire (vraiment) avec les yeux, en effet, ils peuvent tracer des courbes du regard.

Dépasser l’humain

Que l’on s’adresse à des gestionnaires d’énergie comme DCbrain ou à des gestionnaires de chaînes de production comme S-Lean, Di-Analyse Signal, Arundo ou Amiral Technologies, l’Intelligence Artificielle aide à améliorer globalement les performances et à prédire les actions de maintenance. Ces solutions permettent de traiter et d’analyser un grand nombre de données avec la possibilité d’apprendre de situations passées pour évoluer et s’améliorer. Elles offrent bien souvent une meilleure compréhension des processus et des opérations.

L’ange gardien virtuel de la société ARKITE, est un peu le Jiminy Cricket de l’opérateur industriel qui prévient les erreurs et améliore l’efficacité.

V-Optics propose une solution pour contrôler les surfaces transparentes ou à fort indice de réflexion. Là où les approches optiques classiques ne donnent aucun résultat fiable, l’exploitation de la déflectométrie résout le problème. Insensible aux vibrations cette solution peut être déployée en milieu industriel contrairement aux approche d’interférométrie.

Beelse propose un « entrepôt virtuel » pour stocker des fichiers 3D de pièces à imprimer, nous sommes dans le cloud manufacturing.

Étendre les interfaces

La réalité virtuelle, ou dans certains cas la réalité mixte, permet de développer des scénarios de formation joués à distance et en toute sécurité comme le proposent Jungle VR et Revinax ou encore Wanadev. Cela permet bien souvent d’apprendre de ses erreurs sans autre conséquence que de voir un same player shoot again et de recommencer ! Personne ne pourra vous en vouloir d’avoir cassé la dernière machine à un million d’euros. Une belle promesse de Speedernet Sphere « Agir et percevoir pour former plus efficacement » qui propose une solution pour créer une expérience VR et la rendre accessible en ligne en quelques clics.

Casser les codes habituels des panneaux de commande à interrupteurs et petites lumières, c’est ce que propose PRODUCTOO en prenant un vrai virage web, et adoptant une approche moderne des interfaces pour piloter la production et l’organisation. AMIA Systems ouvre de nouvelles voies dans l’analyse pour améliorer les sites de production, la maintenance, la distribution et le stockage.

Quant aux solutions de réalité augmentée, elles restent encore à améliorer, leur principal point faible étant la localisation dans l’espace et la stabilité du rendu. Pour autant, certaines startups semblent être sur la bonne voie, comme par exemple XXII avec un prototype de présentation des réseaux enterrés prometteur.

ThinkDeep propose de mixer intelligence artificielle et réalité virtuelle (VR), je reste persuadé que c’est une approche pertinente pour résoudre certains problèmes de localisation et d’accroche dans la réalité.

Pour que l’homme puisse enfin murmurer à l’oreille des machines dans des univers bruyants, Simsoft Industry développe des assistants vocaux intelligents « maison » pour les techniciens. Vive les interactions main-libres sans dévoiler ses secrets de fabrication aux GAFA…

L’IoT et ses solutions pour tout connecter

Avec plus de 29 milliards d’objets connectés en 2020 (IDATE), il n’est pas étonnant que les plateformes IoT fleurissent, car sans solution pour gérer et capter les données, inutile de tout rendre communicant. Nous en sommes qu’au printemps de l’IoT avec moins de 20% des actifs industriels aujourd’hui connectés et plus de 70% des données de productions enregistrées toujours pas exploitées (World Economic Forum), vivement l’été !

Certains se posent comme pure player des systèmes d’information alors que d’autres proposent capteurs et infrastructure de gestion. Par exemple, TEEPTRAK et SenX développent des solutions logicielles dédiée à la collecte et l’analyse des données de capteurs alors que ffly4u propose une interface et un capteur communicant à fixer sur l’actif mobile pour le suivre et enregistrer son contexte à tout moment (température, chocs, déplacements).

Les communautés

factoryz monte une communauté sur le partage des assets et des ressources humaines dans le monde industriel. L’enjeu est de palier intelligemment aux variations de charge de l’entreprise en rentabilisant du matériel sous utilisé et en permettant à des collaborateurs de prêter main forte à d’autres sociétés et de s’enrichir au passage. Mobility Workajoute un réseau social à son application de gestion de maintenance assistée par ordinateur (GMAO) pour favoriser les échanges entre tous les professionnels de la maintenance. Pas bête !

Et le Smart Building dans tout ça ?

Bien qu’on entende dans toutes les allées des mots comme numérisation, digitalisation, transformation digitale, la notion de jumeau numérique des bâtiments semble n’être encore qu’une notion sans réalité opérationnelle. Beaucoup se demandent encore ce qu’ils ont bien pouvoir faire de leur bâtiment numérisé.

En 2018 d’après le Cabinet ABI Research, dans le monde, seules 6% des entreprises manufacturières ont un jumeau numérique, 83% ont commencé à se renseigner et 29% prévoient de s’y essayer dans les 12 prochains mois. D’après cette étude, 54% des industries manufacturières devraient être équipées en 2026. Les différents cabinets d’analyse estiment que le marché mondial des jumeaux numériques sera autour de 15 milliards de dollars en 2023. D’après Gartner et IDC, les entreprises qui investissent dans un jumeau numérique auront 30% d’amélioration de leurs processus critiques. Il y aura donc bien un retour sur investissement.

La numérisation d’un bâtiment se fait généralement à partir de scanners 3D laser fixes ou mobiles. Une fois la donnée collectée, elle peut être utilisée pour :

établir des plans précis, des modèles 3D voire des maquettes enrichies (BIM) comparer différents états au cours du temps, par exemple avant, pendant et après travaux. Qui n’a jamais rêvé d’avoir une vue de ses réseaux avant que les cloisons ne soient refermées ? avoir une nouvelle interface de navigation dans les bâtiments. Si lors du relevé, vous captez conjointement la 3D et des photos 360°, vous avez la possibilité de naviguer dans vos bâtiments à distance… Quoi de mieux quand les collaborateurs ne sont pas sur le site ? Et puisque j’ai de la 3D, savez-vous que je peux prendre des mesures à distance ? Cette interface peut également service de support de présentation aux réseaux IoT déployés, aux suivis de production, je vois la machine, je clique dessus et j’ai la cadence ou les défauts. Au-delà des équipementiers du secteur comme Hexagon ou Faro présents sur le salon, nous voyons naître des solutions alternatives de numérisation, de valorisation et d’usage des données 3D, comme NavVis. L’usage de moyens de scan 3D mobiles permet d’accélérer la phase de relevé 3D sans compromis sur la qualité (jusqu’à 30 000 m2 / jour). De plus, ces nouveaux scanners permettent de capter plus que la « géométrie » et prennent également des photos panoramiques rapprochées (tous les mètres par exemple). Basés sur ces données, les usages décrits ci-dessus peuvent être activés (navigation virtuelle indoor, modélisation, comparaison, archivage d’état, etc.).

Il est même possible d’activer une solution de localisation à l’intérieur des bâtiments sans avoir à déployer d’infrastructure, un véritable « GPS indoor » à partir d’un simple téléphone mobile et d’une numérisation 3D préalable. Il devient donc possible de guider un technicien sur son site ou un nouveau collaborateur. Cette solution est complémentaire des systèmes de localisation et suivi développés par Wyres (LoRa, BLE, UWB), Ubudu (BLE, UWB) ou Orange (LoRa, BLE, UWB).

Pour établir des modèles 3D spécifiques dans le milieu industriel, 3D-REVERSE peut établir des maquettes 3D complètes d’environnements industriels, de la captation à la modélisation.

Petite mention spéciale pour ARSKAN qui propose une solution intéressante pour visualiser les volumineuses données 3D d’un bâtiment directement dans le navigateur web. Leur solution est basée sur une compression intelligente des données développée en collaboration avec le LIRIS.

En conclusion

C’est sur ce salon que j’ai appris que la région Auvergne-Rhône-Alpes était la première région industrielle de France avec plus de 500 000 emploi dans le secteur. Et c’est également sur ce salon que l’on prend la mesure de la transformation en cours, de cette révolution digitale qui touche tous les métiers. Et maintenant que toute la production ou le stockage peut être piloté et optimisé en temps réel et souvent à distance, il reste à changer d’échelle en misant sur l’intelligence artificielle et le bâtiment digital, deux concepts qui vont radicalement changer la manière dont l’ensemble des unités industrielles vont être exploitées.

Même si l’Homme tend à être persona non grata dans l’univers de la production industrielle, il reste au moins un endroit sur Terre où il fait bon le rencontrer : les salons ! Merci à tous les passionnés avec lesquels j’ai pu échanger.

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