Bien-être des employés, réduction des dépenses liées à l’exploitation des bâtiments, meilleure gestion des bâtiments, comment la digitalisation du Facility Management devient un vecteur de valeur et d’attractivité ?
L’organisation et la gestion des espaces de travail, plus connue sous le nom de « Facility Management » (FM), ont longtemps été considérés comme une charge pour les entreprises. Cependant on observe aujourd’hui une évolution des métiers associés, afin que le Facility Management devienne un levier de création de valeur, répondant à la fois à des objectifs de réduction des coûts et aux attentes des collaborateurs concernant leur lieu de travail. Afin de faire émerger les axes d’évolution du domaine et les levier de création de valeurs, nous avons interrogé avec une vingtaine de professionnels, des consultants en Facility Management, des facility managers du secteur industriel et dans l’immobilier de bureaux (Schneider Electric, STMicroelectronics, HP, Biomérieux, CBRE, Crédit Agricole, etc.). Environnement de travail, nouvelles technologies, et nouvelles responsabilités, nous vous livrons la synthèse de ces entretiens.
Les métiers du Facility Management, une adaptation continue aux occupants du bâtiment
Bien-être au travail, adaptation de l’espace à des besoins métiers et des processus en perpétuelle évolution, optimisation des dépenses énergétiques et de maintenance, le facility manager se tient au coeur de ces enjeux et joue un rôle clé dans l’entreprise. Anciennement connu sous le nom de Responsable des services généraux, on observe une disparition de ce terme en faveur de celui de « facility manager », en phase avec l’évolution de ce métier qui est passé d’une orientation bâtiment, à une orientation occupant du bâtiment.
Cette formule serait d’ailleurs déjà amenée à disparaître dans la langue anglaise, pour laisser place à «office manager», comme l’indique Frans Van Eersel dans son article « 4 Reasons why Facility Management is dead », le métier ayant de plus en plus tendance à se concentrer sur la gestion et l’évolution de l’espace de travail dans le temps, en fonction des attentes des collaborateurs et de l’entreprise.
L’environnement de travail, levier stratégique d’attractivité et de compétitivité
L’environnement de travail est aujourd’hui un facteur important dans le bien-être des employés. Il participe à la motivation des employés et à l’incitation des futurs employés à intégrer l’entreprise. Celui-ci doit donc tout d’abord être en adéquation avec les besoins de chacun des métiers représentés, mais aussi un reflet de la culture d’entreprise. Conscience environnementale, modernité, confort, expérience collaborateur, les attentes des employés évoluent, les responsabilités du facility manager doivent évoluer aussi. On notera par exemple que 47% des employés s’attendent à des régulations concernant l’impact environnemental des bâtiments de travail d’ici 2020 (source : ISS 2020 Vision - New ways of working, the workplace of the future) .
Ainsi, le facility manager doit aujourd’hui collaborer étroitement avec le département RSE de l’entreprise. Étant tous les deux au plus proche des employés et des équipes terrains, le rapprochement de ces deux départements permettra de :
- créer une synergie entre les besoins métiers, et une approche visant à améliorer le bien-être des collaborateurs pour mieux adapter l’espace à ses besoins ;
- définir des objectifs communs de modernisation du bâtiment, dans l’objectif de réduire son impact écologique ;
- collaborer sur des projets visant à atteindre certaines normes et labels liés aux performances énergétiques du bâtiment.
L’IoT et le Big Data, levier de « Facility Optimization Management »
Que ce soit sur un site industriel, dans un bâtiment tertiaire, ou dans les hôpitaux, le Facility Management est de plus en plus orienté vers l’exploitation des données du bâtiment.
Cette approche permet aux facility managers d’étendre leur champ d’action dans l’optimisation des dépenses liées à la gestion du bâtiment, principalement sur des aspects énergétiques et de maintenance, tout en déchargeant les équipes terrains grâce à un reporting automatique des données sur le bâtiment.
Grâce à la diversité des solutions IoT proposées sur le marché, les facility managers bénéficient d’un reporting instantané, récurrent et plus large des données du bâtiment. De multiples usages en découlent :
- La mesure et la régulation automatique du chauffage, de la climatisation, de la consommation d’eau et d’électricité, permettant de réduire les factures en dépenses énergétiques.
- La mesure du taux d’occupation réel des espaces du bâtiment, pour en comprendre son usage et optimiser les prestations de maintenances et des soft services
- La maintenance prédictive, grâce à une anticipation des pannes et une détection des anomalies de fonctionnement, permettant également d’allonger la durée de vie des équipements.
- La géolocalisation, notamment en ce qui concerne les équipements de valeurs sur le site, ou les zones d’intervention de maintenance.
Globalement, l’usage de ces données permet au facility manager de se mettre dans une démarche préventive. Comme nous l’a indiqué Apolline Perez (Experte pilotage Facility Management chez DOSIM) : « Avec ces données, les facility managers sont en capacité d’améliorer les temps d’interventions de maintenance ou d’entretien, d’anticiper des dysfonctionnements et d’optimiser la consommation énergétique du bâtiment, leur permettant davantage de réduction de coûts ».
Ainsi, les facility managers peuvent aujourd’hui actionner de nouveaux leviers d’optimisation des dépenses, tout en répondant aux besoins des occupants, que ce soit en termes de confort ou de besoins métiers.
Jumeau numérique, atout du Facility Management à grande échelle
Passer par un jumeau numérique, sous la forme d’une maquette BIM ou d’une navigation virtuelle, permet aujourd’hui aux facility managers, responsables maintenance ou responsables de site de superviser différents bâtiments sans se rendre sur place.
Par exemple, l’association d’un outil de GMAO à une maquette BIM permet une gestion du site à distance, notamment grâce à la visualisation de la maquette 3D du bâtiment et de ses composantes. L’interface entre ces deux outils permet de faire remonter les différentes opérations de maintenance dans la maquette BIM. Cet usage est d’autant plus pertinent pour les sociétés de Facility Management, comme nous l’a indiqué Franck Gilly (facility manager chez Engie Cofely) car « il permettra de connecter tous les capteurs des bâtiments de nos clients à la maquette BIM pour avoir une visualisation en temps réel et à distance de l’ensemble de leur parc ». Ces données pourront également être disponibles pour l’ensemble des autres parties prenantes du bâtiments : exploitants, propriétaires, sous-traitants, etc.
Cependant, l’un des principaux enjeux pour optimiser pleinement l’exploitation de la maquette BIM en phase d’exploitation, est de garder en permanence à jour les données afin que les informations partagées ne soient pas erronées. Cette difficulté s’ajoutant à la complexité de mise en oeuvre du BIM (coûts, outils, process, etc.) font que l’adoption de ces technologies par les entreprises reste encore peu répandue.
Dans ce contexte, se développent également des technologies de visite virtuelle des bâtiments qui permettent tout d’abord de visualiser (ou de faire visualiser) son enceinte à distance. Ici, on parle toujours de 3D en passant par le nuage de points sans forcément aller jusqu’à l’étape de modélisation et on y superpose des photos panoramiques haute définition. La 3D permet donc d’accéder à des données géométriques précises et la visite virtuelle photo réaliste offre une prévisualisation à distance très utile pour gérer ses opérations. En effet, elle offre la possibilité aux mainteneurs, prestataires et/ou exploitants du bâtiment de pouvoir planifier une intervention avec un référentiel commun sans se déplacer sur site. Le gros avantage réside surtout dans le fait que ces données sont accessibles dans le navigateur web et donc pour tous les collaborateurs autorisés à y accéder contrairement aux maquettes BIM qui nécessitent des logiciels et des machines spécifiques pour les manipuler. Bien évidemment, le BIM va beaucoup plus loin dans l’information et le type de données qu’il embarque mais cette option reste une première étape accessible (techniquement et financièrement) vers le jumeau numérique en répondant déjà à de nombreux cas d’usages, notamment pour des entreprises encore peu avancée dans leur transformation digitale.
Une nécessaire évolution
En conclusion, la digitalisation des métiers du Facility Management permet une optimisation plus fine des dépenses liées à la gestion des bâtiments et une amélioration de l’expérience collaborateur. Ces deux axes de responsabilité sur lesquels s’orientent les facility managers aujourd’hui les placent au cœur d’enjeux financiers et d’attractivité stratégiques pour les entreprises.
D’autre part, au-delà d’assurer la gestion des bâtiments pour des collaborateurs, les facility managers devront intégrer de nouveaux genres d’acteurs dans leurs processus. En effet, les robots, drones et autres véhicules autonomes sont autant de nouveaux « collaborateurs » qui vont interagir avec le bâtiment et les personnes dont il faudra tenir compte. Ils consommeront et produiront des données, permettront de mettre à jour ce que l’on connait des lieux, interviendront dans des phases de maintenance et dans les processus clés de l’entreprise comme le transport, la surveillance, l’analyse, l’inventaire, etc. Pour effectuer leurs tâches, ils devront s’appuyer sur des données 3D à jour (maquette, plans) pour se déplacer ou se localiser dans l’espace.
Le jumeau numérique des bâtiments deviendra donc un support et une ressource pour les facility managers pour intégrer toutes les facettes de leur activité, optimiser leur travail et répondre aux nouveaux enjeux de leur métier.